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GH et DMU : interview croisée Christine Welty et Thomas Similowski

Qu’est-ce que le groupe hospitalo-universitaire (GHU) AP-HP. Sorbonne Université ?


CW : AP-HP. Sorbonne Université est un nouveau groupe hospitalo-universitaire au périmètre de la Faculté de médecine Sorbonne Université. Il est composé des hôpitaux Charles-Foix, la Pitié-Salpêtrière, Rothschild, Saint-Antoine, Tenon, Trousseau et La Roche-Guyon. Une journée à AP-HP. Sorbonne Université, c’est environ 3300 consultations, 23 naissances, 850 passages aux Urgences, 261 actes de chirurgie.

Le nom « AP-HP.Sorbonne Université » symbolise le projet hospitalier et universitaire ambitieux que nous portons et qui repose sur une articulation affirmée avec la Faculté de médecine de Sorbonne Université et des prérogatives étendues. Nous voyons dans cette nouvelle organisation l’opportunité d’enclencher des évolutions en profondeur, qui bénéficieront tant aux patients qu’à l’ensemble des 19 000 professionnels qui y travaillent.


TS :
La réunion de tous les hôpitaux rattachés à Sorbonne Université, à savoir La Pitié-Salpêtrière, Charles Foix, Trousseau, Rothschild, Tenon, Saint-Antoine et La Roche Guyon.

De quand date sa création ?

CW : Le groupe hospitalo-universitaire a été officiellement créé le 1er juillet 2019. Il s’agit de l’aboutissement d’un processus enclenché depuis plus d’un an, et qui a donné lieu à des rencontres et des échanges entre les différents acteurs de notre communauté hospitalière. Ces échanges ont constitué l’opportunité de penser pour les patients un projet commun, d’imaginer de nouvelles collaborations. Ils ont aussi permis d’exprimer des interrogations, des inquiétudes et de réaffirmer des principes clefs comme la nécessité de redonner toute sa place au service et au site, de conforter les organisations qui fonctionnent et de faciliter le quotidien des équipes.

Pourquoi cette réorganisation ?

CW : Pour que l’on puisse prendre davantage d’initiatives, dans le respect d’une stratégie partagée. Pour que les centres de décision soient plus proches des soignants. Pour être plus ouverts sur des partenariats, notamment dans le domaine de l’innovation. Nous savons que ce ne sont pas des structures nouvelles qui changent le quotidien mais mener une réflexion collective sur nos organisations, c’est permettre de trouver de meilleures solutions aux défis auxquels nous sommes confrontés.

Dans quel projet plus global s’inscrit-il ?

CW : Ce projet s’inscrit dans le cadre de la « Nouvelle AP-HP », dont l’une des dimensions est la constitution de nouveaux ensembles hospitaliers, pensés pour être mieux articulés avec les Universités et leur territoire. L’AP-HP se pose depuis des années des questions sur la compatibilité entre sa taille, qui a peu d’équivalent dans le monde, et le besoin de souplesse, de prise en compte des réalités quotidiennes, d’un exercice des responsabilités plus proche du terrain. C’est l’objectif de la « Nouvelle AP-HP » de mieux concilier ces impératifs.

TS : Le moteur initial de la création des groupes hospitalo-universitaires et des départements hospitalo-universitaires (DMU) me semble avoir été le désir de réformer une AP-HP alourdie et fragmentée, en particulier par sa centralisation.

Qu’est-ce qu’un DMU (département médico-universitaire) ?

CW : Les départements médico-universitaires (DMU) succèdent aux pôles. Leur périmètre a été défini lors de deux séminaires fondateurs en décembre 2018 et février 2019.  Le DMU a vocation à réunir un ensemble de services et d’unités fonctionnelles autour d’une logique de soins et de parcours patients, mais aussi autour d’une logique universitaire d’enseignement, de recherche et d’innovation en santé. Avec une gouvernance plus collégiale, pour mieux répartir les fonctions essentielles à la vie d’une structure médicale et mieux répondre aux préoccupations des équipes.  

TS : le regroupement d’un ensemble de services cliniques et/ou médico-techniques constituant soit une filière de soin (ou une gamme de filières de soins) soit une cohérence métier, marqué au sceau de la transversalité intersites.

À quoi sert un DMU ?

CW : La vocation première d’un DMU est la cohérence du parcours du patient et la cohérence du projet de recherche, pas la gestion. L’objectif est de rapprocher des services qui ont vocation à travailler ensemble, à faire des projets communs.  Le DMU doit permettre d’améliorer les interactions entre les services afin de favoriser les filières des patients, les projets universitaires, le développement d’activités mais aussi la mise en commun de moyens et équipements et des projets d’investissements. C’est aussi pour nous l’occasion de mieux penser le travail d’équipe. Avec une plus forte « délégation » à l’égard de ses responsables, pour permettre de rapprocher la décision du quotidien et fonctionner davantage sur la confiance.

TS : L’objectif des DMU est de créer des masses critiques et des synergies entre des services ayant des objectifs, des modalités de fonctionnement, et des valeurs communes, en théorie mais pas exclusivement autour du concept de filière de soin.

Quel est votre rôle en tant que président de CMEL (commission médicale d’établissement locale) du GHU AP-HP. Sorbonne Université ?

TS : Le président de la CMEL porte la parole de la communauté médicale auprès de la direction du groupe hospitalier, c’est son rôle principal. Il joue un rôle d’intermédiaire entre cette communauté, la direction et le doyen. Il participe à l’élaboration des projets médicaux, du plan stratégique, du schéma directeur, pour donner le point de vue de la communauté médicale et veiller au respect des équilibres. Il veille, dans la mesure de moyens qui sont limités par son rôle consultatif, à la préservation des moyens mis à la disposition des malades pour assurer la qualité des soins.

Quelles sont vos priorités pour 2020 ?

CW : Améliorer la qualité de vie au travail pour nos professionnels et l’attractivité pour attirer et fidéliser de nouveaux professionnels : c’est un défi majeur autour duquel nous sommes collectivement mobilisés. Il s’agit aussi de mettre en œuvre notre projet médical, défini avec l’ensemble des équipes exécutives de DMU et le Doyen de la Faculté de médecine. Améliorer la fluidité des parcours, développer les prises en charge innovantes, accentuer les coopérations avec les autres acteurs non hospitaliers : nous faisons en sorte de traduire ces ambitions en réalisations concrètes.

TS : 2020 sera de fait la première année de la mise en place du nouveau groupe hospitalo-universitaire et des DMU. La priorité pour le PCMEL (président de la CMEL) est de construire les systèmes et les procédures qui permettront le fonctionnement harmonieux de ces nouveaux ensembles et des dialogues constructifs et efficaces entre les intervenants. Bien sûr, la poursuite de la réalisation du projet médical tel qu’il a été validé est également une priorité dominante.

Quels avantages pour les étudiants ? pour les chercheurs ? pour les hospitalo-universitaires ?

CW : La nouvelle organisation en DMU doit nous permettre de nous adapter pour mieux assurer notre triple mission de soin, d’enseignement, et de recherche et d’asseoir notre notoriété à l’international. Avec une plus grande prise en compte des logiques de recherche et d’enseignement dont l’excellence nous caractérise. Les DMU vont contribuer à l’animation de l’esprit de la recherche clinique parmi tous les professionnels, notamment ceux en formation, afin d’être en appui des structures hospitalo-universitaires qui portent les idées et les projets de recherche. Un « responsable enseignement » et un « responsable recherche » ont été désignés conjointement avec le Doyen pour porter et promouvoir la recherche médicale et paramédicale et l’enseignement au sein de chaque DMU.

TS : Pour les étudiants, l’unité de base reste le service, l’encadrement de proximité ; il n’est pas évident que les DMU et les nouveaux groupes hospitalo-universitaires aient un impact significatif. Pour les chercheurs, les DMU peuvent matérialiser des collaborations, ou en faire émerger en créant de nouveaux contacts et de nouvelles transversalités. La recherche, en particulier au sein de Sorbonne Université, étant par essence très “connectée” et transversale, les DMU n’y apporteront probablement pas de révolution majeure, et la connexion entre les UMR et les DMU reste une question pour le futur. Pour les HU, l’avenir dira comment s’établira la balance avantages-inconvénients des DMU au regard des multiples pressions qui s’exercent sur eux. En d’autres termes, les DMU vont-ils ajouter des contraintes, ou au contraire fluidifier des fonctionnements ?

Il paraît important de ne pas considérer les nouvelles organisations qui ont commencé à se mettre en place comme immuables. La composition des DMU, leurs modalités de fonctionnement, la façon dont ils interagissent avec la direction hospitalière d’une part et l’université d’autre part doivent absolument être considérées comme expérimentales et donc sujettes à modifications et adaptations. La notion de “groupe hospitalier de grande taille” sera difficile à acculturer. Elle ne pourra l’être que dans le respect de l’identité des sites hospitaliers, qui ne “convergeront” que s’ils ne se sentent pas menacés : pour cela , l’attention au respect des équilibres est importante, tant du point de vue de l’hôpital que de celui de l’université. La création, au sein de la CMEL, d’un collège des représentants de sites est tout à fait fondamentale, et leur rôle sera crucial. Enfin, le discours qui porte les réformes mises en place à l’AP-HP contient une forme de paradoxe, dans la mesure où en même temps que l’on augmente la taille des ensembles (les groupes hospitalo-universitaires, les DMU), on prône le retour de la valeur “service”. Il faudra réussir ce grand écart, dans un contexte difficile ou la quasi-totalité des acteurs hospitaliers et hospitalo-universitaires expriment souffrance et frustration professionnelles. Le défi que les nouvelles structurations doivent relever est de soulager cette souffrance et cette frustration. Si elles conduisent à les aggraver, il faudra avoir le courage et la lucidité de revenir en arrière, ou de réfléchir autrement.

 

Groupe hospitalo-universitaire AP-HP. Sorbonne Université

  • date de l’élection : 16 décembre 2019
  • président : Pr Thomas SIMILOWSKI
  • vice-président : Dr Marie ANTIGNAC
  • hospitalo-universitaire : Pr Jacques BODDAERT

En savoir plus : http://cme.aphp.fr/content/representation-des-cmel-la-cme

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